Trait-d'Union Magazine

Un Cœur Exilé

Si les dernières années ont vu un vent de liberté souffler sur l’Algérie, une revendication cruciale peine à s’y faire accepter, comme un cheveu déposé sur la soupe du consensus : la question des droits des femmes semble éternellement problématique. Face à cette stagnation rageante, il est capital de continuer le combat afin d’améliorer la condition de la femme dans notre pays et au-delà.

Des symboles, pour quoi faire ?

Pour mener à bien cette lutte, aucun instrument ne doit être négligé, y compris les plumes des auteurs solidaires de la cause. Pour certaines, le scepticisme face à une telle approche est de mise. En quoi des romans pourraient-ils faire face aux inégalités dures comme le bitume le plus rugueux qui rythment le quotidien des femmes maghrébines ? Confrontées à des obstacles ignobles, elles auraient le droit de se tourner vers les auteurs et de leur demander : « Vos écrits ne sont-ils pas une coquetterie flattant vos égos mais dont nous n’avons pas le luxe ? »

Si ces interrogations sont légitimes, nous serions malavisés de réduire les lettres à un militantisme d’apparat. Imaginons que, dans notre culture, nous ne trouvions aucune femme à la destinée susceptible d’éveiller la curiosité ou les rêves des générations futures. Ce serait là une terrible perte !

Heureusement, notre imaginaire regorge de figures emblématiques de la gent féminine. Continuer à évoquer ce patrimoine peut faire germer des idées novatrices, préparer un éveil durable des consciences. C’est ainsi que la littérature révèle son potentiel d’alliée précieuse de la cause féministe.

Une histoire de trésors et d’entraves…

Comment concrétiser ce potentiel ? À cette question, il n’y a évidemment pas de réponse définitive, mais nous pourrons hasarder quelques suggestions.

Le passé du Maghreb est d’abord un terreau fertile d’où émergent les épopées de femmes fascinantes aussi bien dans notre histoire que dans notre mythologie, ou encore à la frontière élusive où les deux se mêlent. Évoquer cette histoire, c’est accomplir un acte militant : de nombreux rétrogrades traitent chaque initiative féministe comme une agression portée contre notre héritage. En reprenant possession de celui-ci, nous coupons court à ces critiques.

Il est ainsi vital de rappeler l’existence d’un important mouvement féministe au sud de la Méditerranée, vieux de plusieurs décennies et fort de multiples symboles, de victoires précaires et d’une détermination sans faille face aux revers.

Nous devons cependant éviter le piège de la glorification béate de ce passé. En effet, si ces mouvements féministes sont profondément ancrés au Maghreb, ils ne peuvent pas contenir les solutions à nos problèmes contemporains.  Il s’agit donc de trouver un équilibre dans l’approche de la cause, sans se couper des exemples fournis par les précédentes générations tout en inventant notre propre féminisme, celui qui nous permettra d’enfin surmonter la sclérose misogyne qui paralyse de larges parties de nos sociétés.

Le féminisme maghrébin, une âme autant qu’une arme

Ces idées mettent en relief la nécessité de la lutte féministe dans nos pays et surtout le lien fondamental qui unit celle-ci aux autres enjeux du millénaire. Car ce sont des questions universelles que pose le féminisme au Maghreb : quel rôle la littérature peut-elle tenir dans le monde moderne ? Quel rapport entretenir avec notre héritage ?

Ces interrogations touchent à tous les aspects de notre vie et sont au cœur du combat contre les injustices faites aux femmes. L’amélioration de la condition féminine sous nos cieux ne doit donc pas être une bataille isolée, sans cesse remise à plus tard. Elle ne peut être que le cœur et l’âme d’une transformation profonde de notre monde.

Par Mohamed ABDALLAH

Né en 1997, Mohamed Abdallah est l’auteur de trois romans : Aux portes de Cirta (Éd. Casbah, 2019), Souvenez-vous de nos sœurs de la Soummam (Éd. Anep, 2018) et Entre l’Algérie et la France, il n’y a qu’une seule page (Éd. Necib, 2017).

Auteur

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Directeur de la publication de Trait-d’Union magazine. Membre fondateur, Ex-président et actuel SG du CLEF Club Littéraire de l’Étudiant Francophone de l’université de Chlef. Journaliste et chroniqueur à L’hebdomadaire LE CHÉLIF. Membre du jury étudiant du Prix Goncourt choix de l'Algérie 1ère édition. Enseignant vacataire au département de français UHBC.

Ana Hiya !

Ana Hiya !

Cette mer est la mienne

La mer était toujours la solution !
Dans un paradoxe, de ce qu’est la mer pour nous, les peuples au-delà des mers, elle était toujours la solution !
Nous appartenons à ces mers et elles nous appartiennent … Quand tu t’enfuis vers elle, tu veux la vie, elle t’offre la vie.
Quand tu t’enfuis vers la mer pour une mort désirée, elle te guide vers la mort.

Itinéraires : Mouna JEMAL SIALA

De l’enracinement local au rayonnement continental, l’itinéraire de Mouna Jemal Siala est un modèle du genre : née à Paris, son enfance a connu plusieurs régions et plusieurs cultures, dans le sillage de la profession de son père, haut fonctionnaire, gouverneur et diplomate.

La littérature féminine d’expression Kabyle, rempart de la langue maternelle

Le paysage littéraire dans notre pays est en évolution permanente. Telle une prise de conscience, la femme s’est investie pleinement dans la production et œuvre ainsi à son essor. Cependant, ces dix dernières années, la littérature d’expression kabyle a connu une effervescence remarquable, particulièrement, avec l’émergence d’un nombre de plus en plus croissant d’auteures-femmes de romans écrits en leur langue maternelle, la langue chère à Mouloud Mammeri, Tamazight. Elles sont nombreuses, elles se comptent par dizaine, aux parcours et styles différents. Elles ont toutes cette chose en commun : l’envie d’écrire en sa langue maternelle !
« Ma langue chérie, je n’ai pu raconter l’histoire que par toi et je n’ai pu reconnaitre les choses que par tes mots ; je ne me suis réjouie avec les sens du parler que par tes dires, je m’aventure comme je veux et jamais je ne suis tombée dans le vide. Je n’ai pu prouver avec exactitude mon idée que par ta richesse et par la force de tes mots. », écrit Farida Sahoui, en s’adressant à sa langue maternelle dans l’un des chapitre de son livre écrit sur le Roi Jugurtha en trois langues (français, arabe, tamazight). A son compte trois livre depuis qu’elle a renoué avec sa plume en 2015. En effet, ses premiers écrits en Tamazight remontent aux années 90, des articles publiés dans le journal « Le Pays » (Tamurt).

Femmes du Maghreb, comme si cela datera d’aujourd’hui…

Il y a dans l’histoire de l’Humanité une vérité cachée qui n’est connue que par les avertis et les prévoyants. Ceux-là mêmes qui ne se laissent pas griser par les artifices de la « marchandisation » du monde. Mais cette vérité, quand bien même est altérée, voir muselée par les partisans du statuquo, ne saurait rester à jamais occultée. Et viendra le jour…

Le pardon, la grâce des mères

En France les féminicides sont devenus une banalité médiatique. En écoutant la litanie des statistiques, je ne peux m’empêcher de revenir à mon enfance, et à ce sinistre jour bien particulier. Les souvenirs sont parfois aussi douloureux que les actes.

Ce qui reste de l’hiver

Longtemps, j’ai mis ma plus belle robe pour accueillir le 8 mars. Je me fardais avec subtilité, comme je sais si bien le faire, lâchais mes cheveux, mettais un manteau et des chaussures assortis et allais rejoindre deux ou trois copines pour un après-midi shopping, un café ou, parfois, un film à la Maison de la Culture. Je sais, vous trouvez ça ridicule, et peut-être que vous avez raison. Mais quand vous travaillez debout, du matin jusqu’au soir, tous les jours que Dieu fait, que vous devez supporter une marmaille d’enfants qui s’amusent ou se chamaillent pendant que vous vous tuez à leur expliquer le sens de telle phrase ou la moralité de tel texte, et que, une fois rentrée chez vous, vous devez vous occuper de deux mâles paresseux – votre mari et votre fils – eh bien, croyez-moi, vous guettez le moindre moment de détente. Quand, en dehors du 08 mars, ai-je le temps de voir mes amies ou d’aller à un gala ? Alors, pourquoi ne pas en profiter, mon Dieu ? C’est ce que je me suis dit pendant des années.

ROUGE IMPURE

Sang de mes menstrues. Sang de mes entrailles. دم الحيض. Sang cyclique. Sang impur, de la fille devenue femme. Femme-diablesse. Folle fieffée. Femme pécheresse. Âsiyah ! Ya latif, ya latif ! En ce premier jour de l’écoulement de mes menstrues, je serai confinée dans la pièce de mes supplices éternels, loin de l’odeur capiteuse du […]

JE NE SAIS QUE T’AIMER

Je ne sais que t’aimer et pour ce crime ils disent que je suis devenue impure que j’ai oublié Dieu que j’écris ton corps et ton nom que le feu me guette quand moi je parle de lumière Je ne sais que te dire et dire et dire et la nuit dit avec moi les […]


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