Trait-d'Union Magazine

JE NE SAIS QUE T’AIMER

Je ne sais que t’aimer

et pour ce crime

ils disent que je suis devenue impure

que j’ai oublié Dieu

que j’écris ton corps et ton nom

que le feu me guette

quand moi je parle de lumière

Je ne sais que te dire et dire et dire

et la nuit dit avec moi

les mots des amants

les mots des yeux

elle parle, la nuit,

la nuit africaine, la nuit de la femme,

la nuit bavarde de tous ses silences

Ils disent aussi que je brûle la poésie

que je tue la rime et la rythmique aux roulis de mon corps

que je suis l’impudique

la fille perdue

la lapidée

l’immorale

Pourtant je ne sais que te murmurer et murmurer et murmurer

et la mer murmure avec moi

le geste devenu caresse

le geste devenu musique

Que savent-ils de l’alphabet du monde ?

Le ciel, les nuages, la pluie, les étoiles, la mer

Je ne sais que t’aimer

alors ils essaient de tuer la parole

mes yeux et ma peau

le chant

Ils ont la morale pour horizon

Mais ne savent-ils pas que l’horizon est une femme ?

Je ne sais que t’aimer

arrondie en la matrice liquide

je compte mes doigts

je compte mes cheveux

un mot et un mot

Je dis Ta main

Ils crient que je mérite la mort des pierres

le fouet

que l’on doit couper mes lèvres

moi l’offensante

Je dis l’amour

ils disent la mort

Où sont leurs mères ?

Je ne sais que t’aimer

Interdit, permis,

permise, interdite,

Impur, pur,

pure impure

La mer dort-elle derrière des barreaux?

Je ne sais que t’aimer

Ne savent-ils donc pas que j’aime ?

Où sont leurs mères ?

Où sont leurs mères ?

Ne savent-ils donc pas que je t’aime ?

N’entendent-ils pas la rime perdue ?

Le monde renaît à chacun de mes Je t’aime

Pure impure je suis Je ne sais que t’aimer

Par Mariem mint DERWICH

Chevalier de l’Ordre des Arts et des Lettres en France, Septembre 2017, Mariem mint DERWICH est née le 18 Août 1964 à Nouakchott de mère française et de père mauritanien.
Elle étudie l’histoire et se spécialise en Histoire de l’Afrique au Centre de Recherches Africaines à Paris, Paris I. Chroniqueuse pour l’hebdomadaire francophone mauritanien Le Calame de 1995 à 2017. Enseignante en histoire géographie, enseignante en communication à l’École Polytechnique de Nouakchott et journaliste pour la première radio libre de Mauritanie, la Web Radio Kassataya, Mariem mint DERWICH milite pour les droits des femmes.

Poétesse, elle publie :

« Mille et Un Je, poèmes et notules », Éditions 15/21, collection Lettres Mauritaniennes, Nouakchott, 2014.

Elle publie dans :

  •  » 120 nuances d’Afrique », Anthologie établie par Bruno Doucey, Nimrod et Christian Poslaniec, Éditions Bruno DOucey, 2017
  • « Anthologie des femmes poètes du monde arabe », anthologie établie par Maram al Masri, Éditions Le Temps des Cerises, 2019
  • « Entre ciel et sable », anthologie de poésie mauritanienne d’expression française. Lycée Français Théodore Monod, Nouakchott, 2018
  • Revue La Otra (Mexique), poésie traduite en espagnole. 2018. La Otra est une revue de poésie, d’Arts visuels et autres…
  • Un spectacle à Nouakchott autour de ma poésie mise en musique et en danse « Quand je serai grande », 2019

Auteur

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Directeur de la publication de Trait-d’Union magazine. Membre fondateur, Ex-président et actuel SG du CLEF Club Littéraire de l’Étudiant Francophone de l’université de Chlef. Journaliste et chroniqueur à L’hebdomadaire LE CHÉLIF. Membre du jury étudiant du Prix Goncourt choix de l'Algérie 1ère édition. Enseignant vacataire au département de français UHBC.

Ana Hiya !

Ana Hiya !

Cette mer est la mienne

La mer était toujours la solution !
Dans un paradoxe, de ce qu’est la mer pour nous, les peuples au-delà des mers, elle était toujours la solution !
Nous appartenons à ces mers et elles nous appartiennent … Quand tu t’enfuis vers elle, tu veux la vie, elle t’offre la vie.
Quand tu t’enfuis vers la mer pour une mort désirée, elle te guide vers la mort.

Itinéraires : Mouna JEMAL SIALA

De l’enracinement local au rayonnement continental, l’itinéraire de Mouna Jemal Siala est un modèle du genre : née à Paris, son enfance a connu plusieurs régions et plusieurs cultures, dans le sillage de la profession de son père, haut fonctionnaire, gouverneur et diplomate.

La littérature féminine d’expression Kabyle, rempart de la langue maternelle

Le paysage littéraire dans notre pays est en évolution permanente. Telle une prise de conscience, la femme s’est investie pleinement dans la production et œuvre ainsi à son essor. Cependant, ces dix dernières années, la littérature d’expression kabyle a connu une effervescence remarquable, particulièrement, avec l’émergence d’un nombre de plus en plus croissant d’auteures-femmes de romans écrits en leur langue maternelle, la langue chère à Mouloud Mammeri, Tamazight. Elles sont nombreuses, elles se comptent par dizaine, aux parcours et styles différents. Elles ont toutes cette chose en commun : l’envie d’écrire en sa langue maternelle !
« Ma langue chérie, je n’ai pu raconter l’histoire que par toi et je n’ai pu reconnaitre les choses que par tes mots ; je ne me suis réjouie avec les sens du parler que par tes dires, je m’aventure comme je veux et jamais je ne suis tombée dans le vide. Je n’ai pu prouver avec exactitude mon idée que par ta richesse et par la force de tes mots. », écrit Farida Sahoui, en s’adressant à sa langue maternelle dans l’un des chapitre de son livre écrit sur le Roi Jugurtha en trois langues (français, arabe, tamazight). A son compte trois livre depuis qu’elle a renoué avec sa plume en 2015. En effet, ses premiers écrits en Tamazight remontent aux années 90, des articles publiés dans le journal « Le Pays » (Tamurt).

Femmes du Maghreb, comme si cela datera d’aujourd’hui…

Il y a dans l’histoire de l’Humanité une vérité cachée qui n’est connue que par les avertis et les prévoyants. Ceux-là mêmes qui ne se laissent pas griser par les artifices de la « marchandisation » du monde. Mais cette vérité, quand bien même est altérée, voir muselée par les partisans du statuquo, ne saurait rester à jamais occultée. Et viendra le jour…

Un Cœur Exilé

Si les dernières années ont vu un vent de liberté souffler sur l’Algérie, une revendication cruciale peine à s’y faire accepter, comme un cheveu déposé sur la soupe du consensus : la question des droits des femmes semble éternellement problématique. Face à cette stagnation rageante, il est capital de continuer le combat afin d’améliorer la condition de la femme dans notre pays et au-delà.

Le pardon, la grâce des mères

En France les féminicides sont devenus une banalité médiatique. En écoutant la litanie des statistiques, je ne peux m’empêcher de revenir à mon enfance, et à ce sinistre jour bien particulier. Les souvenirs sont parfois aussi douloureux que les actes.

Ce qui reste de l’hiver

Longtemps, j’ai mis ma plus belle robe pour accueillir le 8 mars. Je me fardais avec subtilité, comme je sais si bien le faire, lâchais mes cheveux, mettais un manteau et des chaussures assortis et allais rejoindre deux ou trois copines pour un après-midi shopping, un café ou, parfois, un film à la Maison de la Culture. Je sais, vous trouvez ça ridicule, et peut-être que vous avez raison. Mais quand vous travaillez debout, du matin jusqu’au soir, tous les jours que Dieu fait, que vous devez supporter une marmaille d’enfants qui s’amusent ou se chamaillent pendant que vous vous tuez à leur expliquer le sens de telle phrase ou la moralité de tel texte, et que, une fois rentrée chez vous, vous devez vous occuper de deux mâles paresseux – votre mari et votre fils – eh bien, croyez-moi, vous guettez le moindre moment de détente. Quand, en dehors du 08 mars, ai-je le temps de voir mes amies ou d’aller à un gala ? Alors, pourquoi ne pas en profiter, mon Dieu ? C’est ce que je me suis dit pendant des années.

ROUGE IMPURE

Sang de mes menstrues. Sang de mes entrailles. دم الحيض. Sang cyclique. Sang impur, de la fille devenue femme. Femme-diablesse. Folle fieffée. Femme pécheresse. Âsiyah ! Ya latif, ya latif ! En ce premier jour de l’écoulement de mes menstrues, je serai confinée dans la pièce de mes supplices éternels, loin de l’odeur capiteuse du […]


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